Utilisation d’aides techniques pour les publics Dys lors des examens, des situations inéquitables sur le territoire.
AMÉNAGEMENTS AUX EXAMENS
Dans leur rapport sur « Des aides techniques pour l’autonomie des personnes en situation de handicap ou âgées : Une réforme structurelle indispensable » remis au ministre de la santé et de la solidarité, en octobre 2020, Philippe Denormandie et Cécile Chevalier, notent qu’en « France, l’ACCÈS aux aides techniques est fortement marqué par des inégalités, dont certaines pourront être qualifiées de discriminations ». Ils précisent aussi que ces inégalités « viennent des interprétations du cadre réglementaire, très complexe en matière de prise en charge des aides techniques. Ces différences d’interprétation peuvent avoir un impact sur l’ensemble des prises en charge financière des matériels. » (p.34) et qu’il « existe de fortes inégalités territoriales » (p.116).
Depuis de nombreuses années, la Fédération Française des Dys (FFDys) dénonce les inégalités entre les rectorats pour reconnaître les besoins des personnes Dys, lors des examens comme pour évaluer les adaptations nécessaires pour compenser leurs handicaps.
Aujourd’hui nous sommes choqués par les décisions prises par le rectorat de Lyon et souhaitons alerter les pouvoirs publics sur l’interprétation erronée que ces services font de la loi.
En effet, dans le « Guide relatif aux aménagements d’examen, Session 2023 », rédigé par la Direction des Examens et Concours il est indiqué, p 6, dans le chapitre C.1 : « Certains logiciels utilisés régulièrement dans le cadre de la formation pourront, le cas échéant, ne pas être autorisés en situation d’évaluation par l’autorité certificative, après appréciation de l’équipe pédagogique, des corps d’inspection disciplinaire et des compétences évaluées en correspondance avec le référentiel des diplômes. Aussi, les logiciels Antidote et Dragon Speak, de nature à créer une surcompensation et donc une rupture d’égalité entre les candidats, sont proscrits. »
Cette décision va à l’encontre :
– D’une part, du code de l’éducation, fondé sur des principes éthiques pour permettre l’égalité des chances entre tous les citoyens et qui précise, dans l’ Article L. 112-4 : « Pour garantir l’égalité des chances entre les candidats, des aménagements aux conditions de passation des épreuves orales, écrites, pratiques ou de contrôle continu des examens ou concours de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur, rendus nécessaires en raison d’un handicap ou d’un trouble de la santé invalidant, sont prévus par décret. Ces aménagements peuvent inclure notamment l’octroi d’un temps supplémentaire et sa prise en compte dans le déroulement des épreuves, la présence d’un assistant, un dispositif de communication adapté, la mise à disposition d’un équipement adapté ou l’utilisation, par le candidat, de son équipement personnel. »
– D’autre part, du décret et la circulaire du 4-12-2020, sur les aménagements aux examens qui précisent que l’objectif est de « garantir la continuité et la cohérence entre les aménagements mis en place sur le temps scolaire et ceux mis en place lors du passage des épreuves d’examens et concours concernés. »
La FFDys a été alertée par plusieurs familles qui ont reçu des avis négatifs suite à leur demande d’aménagements, à quelques jours des examens, dans l’académie de Lyon. Leurs enfants qui ont des usages en classe, au quotidien, de logiciels de reconnaissance vocale, qui leur ont été octroyés dans le cadre d’un plan de compensation, ne pourront pas les utiliser. Ils avaient pourtant obtenu ces aménagements au brevet et ont réalisé leurs évaluations sur le temps scolaire grâce à ces aides techniques.
Par ailleurs, l’argument de « surcompensation », utilisé dans ce guide est impropre, car il concerne le milieu du sport et de l’entraînement. Sorti de son contexte, il suggère qu’il y aurait un avantage, voire une tricherie à utiliser une aide technique qui justement a été attribuée pour compenser un handicap.
Il nous paraît alors indispensable de rappeler la définition de la compensation définie par La loi handicap du 11 février 2005, qui pose le principe du « droit à compensation » : « la personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap, quels que soient l’origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie ». Elle vise à permettre à chaque personne de faire face aux conséquences de son handicap dans sa vie quotidienne en prenant en compte ses besoins, ses attentes et ses choix de vie. Selon la loi, le droit à la compensation englobe « des aides de toute nature à la personne ou aux institutions pour vivre en milieu ordinaire ou adapté » en réponse aux besoins identifiés lors de l’évaluation individualisée.
Interrogé sur ce dysfonctionnement, un responsable du numérique éducatif pour l’école inclusive, nous a répondu qu’il fallait travailler à harmoniser les pratiques sur tout le territoire, car la disparité observée dans le cas du rectorat de Lyon est une source d’inégalité bien plus grave que la prétendue « surcompensation ».
Enfin, dans un monde toujours plus inclusif, on constate que la décision de la Direction des Examens et Concours a d’autres conséquences, toutes aussi graves, car désormais, la MDPH de l’Ain refuse de notifier le logiciel Dragon pour un adolescent avec des troubles dys sévères, sous prétexte qu’ »il est interdit aux examens depuis quelques semaines » par l’académie de Lyon…
Ces situations déclenchent de réelles souffrances pour les élèves et leur famille et amènent du stress aux futurs candidats à quelques jours des examens. Elles ne correspondent pas à l’esprit de loi de 2005, ni à celle de 2013 sur la refondation de l’école qui prônent la non-discrimination et l’égalité des chances dans une école inclusive. De plus, ces décisions vont à l’encontre de la CIDPH, Convention internationale relative au droit des personnes handicapées, ratifiée par la France en Février 2010 et qui prime sur la loi française.
La Fédération Française des Dys constate que malgré́ les différentes interventions régulières de la Défenseure des Droits et de la médiatrice de l’Éducation Nationale auprès des centres d’examens et rectorats ces questions de la discrimination auprès des publics Dys ne sont toujours pas résolues.