Dyslexie, dyspraxie, dysphasie… Les Dys en entreprise, ce tabou qui peine à être levé – Les Echos – 21/10/23

Les troubles cognitifs englobent tous les dysfonctionnements des fonctions cognitives, comme le langage, l'attention, le geste ou le calcul. (Shutterstock)
Photo: « Les troubles cognitifs englobent tous les dysfonctionnements des fonctions cognitives, comme le langage, l’attention, le geste ou le calcul. » (Shutterstock)

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Ces troubles cognitifs, qui affectent l’enfant puis l’adulte, ont des retentissements dans toutes les étapes de la vie d’un « Dys ». En entreprise, l’assumer demeure compliqué.

Trois lettres qui recouvrent une multitude de troubles. Selon la Fédération Française des Dys, quelque 7 millions de Français seraient concernés par ces troubles du langage écrit (dyslexie), du langage oral (dysphasie) ou de la gestuelle (dyspraxie). « La grande majorité de ces personnes arrivent à travailler en milieu ordinaire, d’ouvrier dans les vignes à ingénieur aérospatial, en fonction de la sévérité de leur trouble et de leurs envies », rassure Nathalie Groh, présidente de la FFDys.

Dans sa dernière enquête, la fédération constate en revanche qu’en emploi tout comme en formation professionnelle, les personnes souffrant de troubles des apprentissages sont peu ou mal accompagnées. Avec comme conséquences des difficultés (ou abandons) d’orientation, de formation et d’insertion professionnelle.

Mettre en valeur ses points forts

Parmi les actifs, 80 % des sondés déclarent travailler en temps plein, et près des deux tiers sont en CDI. Plus de neuf sondés sur dix ont également informé l’entreprise de cette situation de handicap. « Seuls 23 % des dys le mentionnent sur le CV, car ils veulent passer la barrière du premier entretien. Et lors de cet exercice, ils ne veulent pas dire ce qu’ils ne savent pas faire, et préfèrent mettre en avant leurs compétences. Il y a aussi une fracture générationnelle: les seniors sont davantage gênés, et ne le diront peut-être jamais, tandis que les juniors ont bénéficié d’un plan d’action gouvernemental mis en place en 2001 pour dépister, diagnostiquer et prendre en charge ces troubles dès l’école. »

Toutes les voies sont possibles, insiste-t-on à la fédération. Grâce aux différents aménagements possibles dans la vie d’un Dys – plus de temps pour passer un examen, ordinateur et temps de travail adaptés – aucun secteur n’est fermé. « Rien n’empêche une personne porteuse d’un ou plusieurs troubles de devenir médecin par exemple, même si c’est plus difficile que pour les autres. Il y a des professeurs des écoles, de mathématiques, de musique et de technologie, des avocats et des juristes… », assure Nathalie Groh.

Construire le parcours professionnel

Autre enseignement de cette enquête, les Dys actifs bénéficient, en majorité, d’un référent handicap dans leur entreprise, avec qui ils ont pu discuter, à près de 90% de leurs besoins. Les besoins de compensation les plus fréquents sont issus des difficultés dans la hiérarchisation des missions à accomplir et dans la rédaction des documents. A noter qu’un bon tiers des sondés affirme ne pas avoir eu besoin d’aide au travail.

De nombreuses solutions existent en entreprise, qu’elles soient mises en place par un référent handicap, un pôle santé ou un manager qui doivent être formés et informés. « Les Dys doivent avoir un projet construit tout au long de leur parcours, de l’entrée à la sortie de l’entreprise », explique Amélie Gonguet, chef de projet QVT chez Aésio Mutuelle. Dans cette entreprise, salariés et managers profitent d’actions de formation et de sensibilisation. Ces derniers peuvent bénéficier de séances de coaching pour mieux intégrer les Dys, avec ou sans le salarié concerné: « nous respectons les choix du salarié. S’il préfère garder l’anonymat, ce processus se déroulera sans lui », affirme-t-elle.

Libérer la parole

Hélène Quénéhervé, directrice Action Sociale et Solidaire au sein de la même mutuelle, insiste sur la libération de la parole des collaborateurs : « en menant un entretien pour se rendre compte précisément de la situation, nous pouvons adapter les choses et faire du sur-mesure ; nous souhaitons que ce volet inclusif rentre dans le collectif. »

Dans ce sens, les équipes participent à des webinaires pour se mettre dans la peau d’un Dys. Parmi les exercices pratiques: s’obliger à écrire de la main gauche lorsqu’on est droitier pour se frotter à la dysgraphie, déchiffrer un texte écrit en pattes de mouche…

Autre axe développé par l’entreprise : le soutien des parents d’enfants diagnostiqués Dys. « Nous mettons en place des rendez-vous avec nos salariés concernés pour qu’ils puissent parler et être conseillés et accompagnés selon leurs besoins individuels », détaille Hélène Quénéhervé. « Côté pratique aides pour les enfants Dys de nos adhérents, nous disposons également d’un dispositif solidaire pour prendre en charge une partie des coûts générés par ces troubles qui peuvent chiffrer très vite (séances d’orthophonie ou de psychomotricité, consultations chez un psychologue ou ergothérapeute), et proposons des dispositifs ciblés comme un abonnement à une application ludothérapeuthique (Poppins) pour accompagner le développement de l’enfant ou une aide pour des cours de soutien adaptés avec un enseignement formé à ces problématiques. » Enfin, la mutuelle offre aux parents concernés quatre journées d’absence par an pour des rendez-vous médicaux ou administratifs.

Publié • Les Echos Par Neïla Beyler

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