La dysorthographie, trouble de l’orthographe méconnu – Aufeminin.com
Ah, les dictées ! Si pour certains c’est une vraie partie de plaisir, pour d’autres, cet exercice relève plus de l’enfer. À l’heure où on aime utiliser l’expression « il est fâché avec l’orthographe », sachez que pour certains, il s’agit véritablement d’un handicap qui a un nom : la dysorthographie.
La dysorthographie est un trouble spécifique de l’apprentissage de l’orthographe. Ce trouble comme tous les troubles Dys est durable. Les personnes dysorthographiques n’assimilent pas correctement les règles orthographiques. Pour les enfants, cela a de lourdes conséquences pour leur scolarité et pour les adultes, pour leur insertion et leur vie professionnelle.
Les causes de ce trouble de l’orthographe
Même s’il existe des cas isolés qui sont simplement dysorthographique, le trouble de la dysorthographie est le plus souvent une conséquence de la dyslexie . Quand l’enfant a des difficultés avec le langage écrit, quand il ne parvient pas à maîtriser correctement les règles de conversion graphèmes-phonèmes (B et A = BA), il a du mal à automatiser la reconnaissance d’un mot. Pour les lecteurs, qui n’ont pas rencontré de difficultés pour mettre en place le décodage de chaque syllabe, la lecture devient rapide et implicite. Ils peuvent alors réfléchir au sens du texte et retenir l’orthographe des mots. Ce n’est pas le cas des enfants dysorthographiques.
Dyslexie et dysorthographie, des liens étroits
Les personnes dysorthographiques sont fréquemment dyslexiques. En effet, c’est en décodant fréquemment et correctement des mots, que l’enfant les mémorise progressivement en traces stables et les automatise, dans son lexique orthographique. Il devient alors capable de les reconnaître en lecture globale. Tout déficit de ce processus entraîne par conséquent des difficultés dans la mise en place du lexique orthographique* qui est sollicité chaque fois que l’on veut écrire un mot. Ce sera encore plus difficile quand les mots sont irréguliers, par exemple, avec un mot comme « monsieur » dont la prononciation est éloignée de sa forme écrite. Ensemble, les deux troubles, dyslexie-dysorthographie forment « le trouble spécifique de l’acquisition du langage écrit ».
Chez les dysorthographiques, ce lexique orthographique n’est pas stabilisé. Ils sont ainsi capables d’écrire le même mot de manière différente d’une ligne à l’autre. L’orthographe des mots est aléatoire et souvent phonologique (les dysorthographiques écrivent comme ils parlent). Visuellement, il est parfois difficile de comprendre le mot qu’a voulu écrire la personne qui souffre de ce trouble du langage écrit. Il faut parfois lire à haute voix pour comprendre le sens de la phrase.
Exemple : “Le téritoir japoné na casimen o qu’une resourse naturel et son relief et tré contrénian il et dificile d’y construe et son donc la population est aglutiné sur les litoro” (élève de 3e dyslexique dysorthographique).
Outre ce stock qui se stabilise difficilement, les dysorthographiques sont tellement concentrés sur l’écriture du mot, qu’ils en oublient les accords. En effet, ils ont peu de disponibilité cognitive pour gérer des activités plus complexes, comme la mise en place des accords, la concordance des temps, ou la syntaxe.
Comment détecter ?
Ces troubles peuvent donc principalement être repérés à l’école, dès l’apprentissage de la lecture et l’entrée dans l’écriture. Les parents sont souvent les premiers à observer que quelque chose ne va pas. Si ces difficultés persistent, après quelques mois, les enseignants qui évaluent le niveau de l’enfant alertent les parents. Ces derniers peuvent demander à leur médecin référent d’établir une ordonnance pour demander un bilan orthophonique (pris en charge par l’Assurance maladie). Cette évaluation permettra de faire le diagnostic de la dysorthographie.
Des conséquences sur les apprentissages scolaires et dans les activités de communication au quotidien
Le système scolaire classique n’est pas adapté aux enfants dys. Le langage écrit est le mode de communication privilégié dans l’enseignement, la communication des informations en général, les consignes d’examens, etc. Ces troubles de l’orthographe interfèrent donc les apprentissages scolaires, l’activité professionnelle et la vie sociale.
Chez les personnes atteintes sévèrement de dysorthographie, ce trouble cognitif peut être une incapacité totale à identifier les mots et donc à lire. Pour les cas les plus courants, de nombreux signes sont observés. Parmi eux :
- une difficulté à identifier les mots ;
- une difficulté à lire sans erreurs et de manière fluide ;
- une lenteur exagérée de la lecture ;
- une difficulté de compréhension des textes, due à la lenteur de décodage ;
- une écriture lente et difficile, parfois illisible (dysgraphie) ;
- de nombreuses erreurs d’orthographe ;
- une grande fatigue liée à l’activité de lecture et d’écriture ;
- une difficulté à consolider et à mobiliser le stock orthographique.
Ces symptômes, plus ou moins marqués, ont bien sûr des répercussions à l’école. Par exemple, l’enfant aura du mal à écrire lors d’une dictée et aussi des difficultés à copier ce qui est au tableau dans le délai imparti. Ses cahiers seront souvent mal écrits et incompréhensibles, entraînant des difficultés pour faire ses devoirs.
Les contrôles, ou tout examen écrit sont problématiques puisque l’enfant éprouve des difficultés à comprendre les sujets écrits et à produire une copie lisible et correctement orthographiée. Il a en général besoin de beaucoup plus de temps que ses camarades pour réaliser des activités d’écriture. Il est souvent en double tâche (situation qui met en jeu simultanément deux tâches cognitives et nécessite de partager son attention.) Par exemple, la concentration ne peut pas se faire à deux endroits : être lisible et montrer ses connaissances sur le sujet traité.
Les traitements possibles
Les personnes ayant de forts troubles dysorthographiques le seront toute leur vie avec plus ou moins de sévérité.
Voici un exemple de message posté par un adulte dyslexique de 50 ans :
“bonjour jémerai avoure une réponse a ma question ce que mon mail cé pairedu dans les méandre du woube ? avec tout me résepai«
Ce sont des personnes qui se questionnent à chaque fois qu’il faut écrire un mot et qui sont obligées de vérifier constamment leur orthographe. D’autres, vont parvenir peu à peu à corriger leurs difficultés, souvent grâce à des prises en charge en orthophonie. Malgré tout, ils seront toujours des écriveurs peu sûrs d’eux.
La rééducation orthophonique est la principale remédiation pour aider un enfant dysorthographique et/ou dyslexique. Cette remédiation cognitive (réparation de ce trouble) prend souvent des années, et en cas de dyslexie-dysorthographie sévère, peut se dérouler de la classe de CE1 jusqu’en 3e. Consulter un orthophoniste, qui devient un véritable allié pour surmonter les difficultés scolaires, est donc très bénéfique pour ces troubles Dys.
Selon la sévérité du diagnostic, et en raison de troubles associés, les orthophonistes peuvent orienter l’enfant vers d’autres professionnels de santé pour diagnostiquer ces troubles. Des compensations peuvent aussi être mises en place.
À l’école, les enfants peuvent bénéficier de dispositifs spécifiques pour faciliter leur scolarisation.
Cela peut-être :
- un accompagnement pédagogique dans le cadre d’un projet d’accompagnement personnalisé (PAP). Des adaptations sont mises en place par les enseignants, comme l’adaptation des supports, l’octroi de temps supplémentaire pour réaliser les activités, la réduction du nombre d’exercices, les évaluations à l’oral quand l’écrit est trop compliqué..
- ou un projet personnalisé au cours de leur scolarisation (PPS), qui, en plus d’aménagements pédagogiques, va leur ouvrir des droits de compensation. Cela se caractérise par exemple, par l’octroi d’une par une aide humaine ou la mise à disposition d’outils informatiques (ordinateur portable, logiciels spécifiques…). Il s’agit de tout mettre en oeuvre pour que l’élève puisse monter ses compétences au cours de sa scolarité, en prenant en compte ses difficultés et en proposant des moyens de les contourner ou de les compenser.
Pour un enfant dyspraxique qui serait également dysgraphique, le fait d’avoir un ordinateur lui permet de montrer ses compétences. Même si le travail rendu sur l’ordinateur présente des fautes d’orthographe, l’enfant peut tout de même être corrigé ce qui ne serait pas le cas avec son écriture cursive et illisible. L’enseignant devra certainement parfois lire le travail à haute voix pour en comprendre le sens, mais au moins, l’enfant pourra rendre son exercice et prétendre à une bonne note. Cet outil est excellent pour l’estime de soi, car l’enfant rend un travail propre. L’utilisation de l’ordinateur peut également l’aider à progresser en orthographe.
Le travail sur l’estime de soi est très important lorsqu’on sait que tous les enfants multi-dys ont consulté un psychologue ou psychiatre à un moment donné pour dépression. Et cela, parfois même, dès l’école primaire.
*Le lexique orthographique peut se définir comme une composante de la mémoire à long terme qui contient l’ensemble des représentations orthographiques des mots connus par un individu (Estienne, 2002).
Merci à Laetitia Branciard, Vice-présidente de la FFDys.
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La dysorthographie : un trouble de l’orthographe méconnu
par Magaly Lapierre le 25 octobre 2019